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Pas si facile de passer à l’hydrogène vert

Richard Banford
30 octobre, 2022
MARTIN OUELLET-DIOTTE/AFP via Getty Images

Que peut-on espérer de notre nouveau gouvernement majoritaire élu par les régions dont la nôtre avec l’ensemble de ses cinq députés dont une ministre? On pourrait se montrer démesurément optimistes, mais le Saguenay-Lac-Saint-Jean en a vu d’autres.

Il fut un temps où la région envoyait à Québec cinq députés dont un premier ministre pour qui la route à quatre voies dans la réserve faunique des Laurentides ne faisait pas partie des priorités. En tout cas, pas celles dégagées par des sommets, ces réunions des instances politiques, sociales et économiques où on cherchait à identifier les soi-disant  préférences du milieu.

Priorité du boss

Tout le long de la campagne et même avant, depuis son voyage à Glasgow en fait, le premier ministre Legault avait toujours refusé de se rendre à ces grands rendez-vous internationaux. Mais celui-là l’a marqué. Il est revenu avec la certitude que le développement du Québec passerait dorénavant par l’hydrogène vert.

Il est vrai que pour les pays d’Europe, pris en otage par cette guerre en Ukraine, la perspective de se libérer de leur dépendance au pétrole de la Russie par la production de l’hydrogène propre apparaît comme fort attractive.

Logique que le premier ministre québécois s’y intéresse puisque la production d’hydrogène exige beaucoup d’électricité et que Québec en possède à revendre. Et François Legault en fait sa priorité.

Que deviennent nos projets

On le sait, le gouvernement Legault a mis une croix sur la production chez nous de gaz naturel liquéfié. Ce qui a ralenti considérablement le développement de port Saguenay, porte de sortie pour l’exportation sur le monde.

Les suites de cette décision ont donné lieu à la mise au rancart de d’autres projets comme BlackRock, qui s’est mise sous la protection de la faillite avant que ses parts ne soient récupérées par Investissement Québec et Orion le printemps dernier. Mais depuis, les travaux de construction de la ferronnerie à port Saguenay traînent.

De même Arianne Phosphate, qui devait tirer du minerai près du Lac à Paul afin de le transformer en fertilisant agricole, semble s’être effacée dans les vapeurs de la pandémie.

Reste la nouvelle entité, First Phosphate, dont les claims trouvés pas loin de Bégin et de Lamarche devraient fournir suffisamment de minerai pour desservir une usine de raffinement de phosphate destiné à l’industrie des batteries au lithium. Mais il reste beaucoup à réaliser avant qu’on approche la coupe des lèvres.  D’autant plus que même si cette entreprise présente toutes les caractéristiques d’une production carbone neutre fort acceptable, d’aucuns parmi les verts commencent à douter de l’efficacité écologique de l’auto électrique munie de batteries au lithium. Et l’entreprise n’a pas encore obtenu les autorisations environnementales des gouvernements.

Hydrogène vert

Alors, si le Premier ministre maintient sa position à propos de l’hydrogène vert, la région ne pourra guère compter sur lui et ses cinq députés régionaux pour la réalisation de ses projets. À moins bien sûr qu’on puisse compenser en installant sur ce site industrialo-portuaire une entreprise de production d’hydrogène vert. Plusieurs projets sont présentement en cours, a déjà indiqué le ministre canadien des Ressources Naturelles, Jonathan Wilkinson.

Mais voilà, là aussi se trouvent des gens pour mettre en doute la réalisation de ces projets. Pour un Paul Martin, coordonnateur du groupe scientifique indépendant Hydrogène Science Coalition, explique que la plupart de ces projets misent sur une conversion vers l’ammoniac pour le transport par navire vers l’Europe.

Or, le passage de l’électricité à l’hydrogène implique des pertes de 30 à 40% d’énergie et la transformation en ammoniac, un autre 15%. Et quand on veut reconvertir l’ammoniac en hydrogène, on subit des pertes en énergie du même ordre. Actuellement, la moitié de la production de l’hydrogène tiré de combustible fossile sert à la fabrication d’ammoniac qui entre dans la fabrication d’engrais. Et le clou dans le cercueil vient du groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), l’hydrogène ne comptera que pour 2% du bilan énergétique en 2050.

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