Éditorial - Ça y est, une autre entreprise de Saguenay devra perdre beaucoup de temps et beaucoup de sous pour se sortir d’une situation où elle s’est bien involontairement placée.
Tout d’abord, mettons les choses au clair. Je ne possède pas d’intérêt dans l’entreprise Gazon Savard. Je la connais comme une entreprise familiale de chez nous qui ne cesse de grandir à la faveur d’un entrepreneurship qui nous a toujours manqué dans notre région où la production d’aluminium, l’exploitation forestière et agricole dominent les activités économiques.
Après une poursuite intentée par la ville de Saguenay contre l’entreprise Gazon Savard, voici qu’un groupe de citoyens de Laterrière demande à la Cour Supérieure de l’autoriser à exercer un recours collectif. Du côté de la ville de Saguenay, il s’agit d’une poursuite pour infraction aux règlements de la municipalité. Pour les résidents de Laterrière, si l’autorisation leur en est donnée, il est question de dédommagement monétaire.
Incohérence administrative
Il ne s’agit pas de tenter de déterminer qui a raison ou qui a tort. Mais comment ne pas s’inquiéter devant l’impact des poursuites publiques de ce genre sur le développement de notre région? Exception faite des avocats concernés, à qui profitent ces récriminations?
Peut-on croire que d’éventuels investisseurs ne considèrent pas le climat social avant de se choisir un lieu pour participer au développement d’une ville, d’une région? Jumelée à l’incohérence des décisions administratives qui se prennent à l’hôtel de ville et la confusion qu’on retrouve à la table du conseil, on ne retrouve rien chez nous pour attirer les investisseurs.
Des exemples démotivants
À Saguenay, GNL est rejetée du revers de la main par les deux paliers de gouvernements supérieurs, sans qu’aucun de nos leaders politiques ne lève le petit doigt. Pourtant, en raison de la guerre en Ukraine, on connaît une montée fulgurante de l’exploitation du gaz naturel liquéfié qui libère l’Europe, de l’emprise du pétrole russe. Les fournisseurs engrangent les milliards pendant qu’ici, on attend qu’Arianne Phosphate, First Phosphate, BlackRock viennent s’établir dans un parc industrialo-portuaire toujours aussi désœuvré.
Un projet de biométhanisation, auquel Gazon Savard s’intéressait, s’est déjà buté à l’acceptation sociale à Laterrière. C’est d’ailleurs sur la vague de ces contestations que la mairesse Julie Dufour a réussi à ravir le siège de la mairie à Josée Néron.
Pas dans ma cour
L’entreprise Gazon Savard, qui a su diversifier ses opérations au fil du temps, a obtenu, entre autres, le contrat du traitement de nos matières putréfiables. La municipalité se dit d’ailleurs fort satisfaite du déroulement des opérations et de la réponse de la population à ce nouveau défi.
Mais voilà, le voisinage de l’entreprise doit subir les contrecoups du transport, de la manutention et de la production. Et on prend les grands moyens pour obliger l’entreprise à corriger la situation jusqu’à la menacer de recours collectif.
Mais qui donc va s’occuper du compostage si on refuse aux entreprises le traitement de ses déchets que personne ne veut voir dans sa cour? D’ici 2030, le gouvernement du Québec doit investir 1,2 milliard$ pour le recyclage des matières organiques.
Mais à Saguenay, où la planification fait cruellement défaut, on semble bien loin d’avoir prévu une solution adaptée aux inconvénients affectant le voisinage de l’entreprise concernée. Pire, on se retrouve dans une situation paradoxale où le conseil de ville accorde un contrat à une firme pour traiter ces déchets domestiques tandis que la mairesse appuie le groupe de contestataires qui cherchent à obtenir l’autorisation d’exercer un recours collectif contre cette même entreprise.
Un nœud gordien auquel il faudra s’habituer si rien ne change autour de la table du conseil de ville de Saguenay.
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