Certains événements demeurent collés à notre mémoire malgré les années qui passent. Le 25 janvier 2005, c’était la confirmation, 640 employés d’Abitibi-Consolidated de l’arrondissement de La Baie apprenaient qu’ils ne rentreraient plus jamais à l’intérieur de l’usine.

Imaginez que Montréal annonce la fermeture d’une usine de 40 000 employés. Pour la communauté tissée serrée de La Baie, il n’y a pas une famille dont un parent, un ami n’avait eu un rapport avec ce que tout le monde connaît sous le nom de la Consol.

Mouvement populaire

Bien que les rumeurs de fermeture flottaient dans l’air depuis quelques semaines déjà et malgré les nombreux arrêts de productions depuis les dernières années, jamais les travailleurs n’ont pu imaginer une fermeture définitive. Durant plus d’un an, la population s’est mobilisée, alertant les autorités gouvernementales et les propriétaires de l’entreprise, Abitibi-Consol, mais rien n’y fit. Cette dernière consolidation dans l’industrie du papier marquait la fin de la production à l’usine de La Baie.

Triste souvenir

Déjà, à la fin de décembre 2004, le maire de la ville de Saguenay, Jean Tremblay, était prévenu. L’annonce officielle de la fermeture viendrait au début de l’année 2005.

Je m’en souviens comme si c’était hier. C’est ce qui a contribué à réorienter ma carrière vers la fonction publique. Le mois précédent, en novembre, on me signifiait la coupure de mon poste de directeur de l’information au Progrès-Dimanche. J’étais victime de la restructuration commandée par le nouveau propriétaire montréalais, Gesca.

La concurrence des réseaux sociaux grugeait déjà les derniers remparts des médias écrits et de l’industrie de la pulpe et du papier. Or, le cabinet du maire se trouvait face à une situation où il fallait gérer d’inquiétantes pertes d’emplois et les bouleversements sociaux qui s’en suivent immanquablement.

Appel impromptu

En fin de journée, le 24 décembre 2024, je reçois un appel directement du chef de cabinet du maire, Ghislain Harvey. On veut me rencontrer dans l’heure qui suit pour me proposer le poste de responsable des communications au sein d’un nouvel organisme de développement économique.

Le maire Tremblay, secoué par la nouvelle de la fermeture de l’usine de La Baie, venait de créer Promotion Saguenay, pour trouver des substituts économiques pour remplacer les pertes d’emplois à La Baie. Je m’occuperais de reléguer toute l’information nécessaire aux médias régionaux et à ceux de tout le pays. J’acceptais la proposition du maire en me disant que ma nouvelle situation de chômeur m’aiderait à mieux comprendre ce que s’apprête à vivre les 640 employés de la Consol.

Pénible expérience

Outre le chassé-croisé des appels à l’aide, j’ai encore en tête l’image du maire, Tremblay, insistant au téléphone auprès du premier ministre, Jean Charest, afin qu’il vienne à La Baie rencontrer les travailleurs pour les supporter dans leur malheur.

Et quand la fermeture est devenue inéluctable, le maire passait ses journées à essayer de trouver des activités économiques afin de remplacer les emplois perdus avec la fermeture de la vieille usine de la Consol. De là est née, entre autres, l’idée d’une escale pour les bateaux de croisières et d’un village d’accueil. Des projets qui voulaient mettre un baume sur la pénible réalité que vivait toute la population de La Baie qui n’a jamais tout oublié depuis.