« Quand on est au plus haut, c’est là que le diable vient vous tenter ». C’est le grand acteur oscarisé Denzel Washington qui a lancé cette analogie à Will Smith, après que ce dernier eut à rendre des comptes publiquement après avoir giflé l’humoriste Chris Rock à la soirée des Oscars.

On pourrait l’appliquer au premier ministre François Legault qui a lancé, à micro fermé « y est pas mort lui? » lorsque le nom du vétéran député libéral Pierre Arcand a été mentionné devant les membres de l’Assemblée nationale cette semaine. Il ne s’agit pas de la première métaphore controversée que le PM lance publiquement.

Qu’on se souvienne de celle concernant la députée Manon Massé (les poils dans la soupe), ou celle au sujet de la Covid 19 ("qui n’était pas pire qu’une grippe"). François Legault laisse tomber les barrières et affiche une assurance qui ne lui profite pas toujours. On peut l’observer non seulement dans ses déclarations qui suscitent ses excuses, mais aussi dans des décisions politiques qui touchent tous les citoyens.

Troisième lien et GNL

On le constate avec le dossier du troisième lien à Québec et celui des CHSLD dont le nombre de décès a été comparé à une banale défaite. Parce que, même si la promesse d’un troisième lien présente des dommages environnementaux plus considérables que GNL, il représente pour les sympathisants caquistes de Québec une motivation électorale très forte. Il faut comprendre que ce projet n’a pas encore été dénoncé par la junte écologique et qu’il sera plus difficile de bloquer une telle initiative à Québec qu’au Saguenay, où la ligne de parti péquiste dicte la marche à suivre à la majorité de la population.

On peut encore observer ce genre d’improvisation dans la décision d’offrir aux régions des vols intérieurs à 500$. Pour aussi alléchante qu’elle paraisse, cette annonce cache beaucoup d’incertitude. En plus de fragiliser le projet de coopérative de transport régional (TREQ) il ne tient pas compte de la concurrence d’Air Canada, qui ne fait pas de quartier quand vient le temps de baisser ses prix pour se débarrasser des plus petites compagnies.

Et puis, à 500$ un aller-retour à Montréal n’est pas accessible à toute la classe moyenne. Rien en tout cas pour augmenter l’achalandage au point de rentabiliser ce type de transport. De fait, la réalité c’est que le nombre d’utilisateurs affecte davantage le transport en région que tout autre facteur. En Allemagne, par exemple, il en coûte moins cher aujourd’hui de prendre l’avion que de prendre le train.  La demande augmente avec la force du nombre et chez nous, même à 500$, les avions ne partiront jamais remplis à pleine capacité.

À l’écoute

On comprend que le chef de la CAQ veuille se mettre à l’écoute de la majorité. Malgré qu’un sondage IPSO commandé par l’Institut économique de Montréal indique que 53% des Québécois souhaitent voir le projet GNL aboutir, il persiste et refuse de rouvrir le dossier. Selon Gabriel Giguère de l’IEDM, la position de M. Legault et de son parti est anachronique. Parce que, en même temps que de vouloir se propulser vers l’avenir avec son projet de loi interdisant les hydrocarbures, il refuse un projet qui permettrait à des pays pollueurs de réduire de 50% leurs émissions.

Si le premier ministre mène dans les sondages et semble se diriger allègrement vers un autre mandat, il ne doit pas minimiser l’effet de ses décisions et de ses envolées oratoires qui parfois frisent l’arrogance. En politique, le vent tourne rapidement quand l’électorat sent que ses leaders prennent leur distance avec les réalités de la base.